Seconde partie du cours de Jean-Louis Dozome en 2013 qui porte sur la concentration
Le terme Se concentrer a la même racine que la confiance : « Con » qui veut dire avec.
Cela signifie se centrer de l’intérieur. C’est une harmonisation. Il s’agit de prendre l’habitude de m’harmoniser par rapport à ce que je suis, c’est une visite, un état des lieux. Ce que je suis n’est pas négociable. Ce qui est négociable, c’est la façon dont mon esprit interprète tout cela. Je suis ce que je suis. J’ai beau m’évertuer à me mettre un costume, à me déguiser par mes paroles, à maquiller … Je ne peux pas dépasser ce que je suis en tant qu’être incarné. Quand je parle d’état des lieux, cela veut dire me rendre compte de mon état d’être et comment je peux nourrir cet état d’être de beaucoup de choses que je peux puiser, capter tout autour de moi, canaliser et faire évoluer, de quelle façon j’utilise mon état d’être : comment je peux transformer de l’énergie ?
Quand on parle de concentration, le premier réflexe est d’y voir cette notion d’effort, de tension. C’était en quelque sorte vu de cette façon par les instituteurs. En fait, quand on voit les enfants jouer, qui partent dans un univers de jeux, ils sont complètement absorbés et concentrés sur ce qu’ils font. Il ne faut donc pas se tromper quant à l’interprétation du mot et de revenir à son origine étymologique.
Lorsqu’on décide de revenir à l’intérieur de soi, de faire silence, de se concentrer, on accepte la perte, on accepte le manque, on accepte ce que les Celtes appelaient les petites morts, c’est-à-dire, le fait de cesser de vouloir faire vivre quelque chose d’une façon intentionnelle, tendue. On accepte de se détendre, on accepte d’être à soi. Être à soi c’est avoir une position assise, accepter de ne pas bouger, de ne pas être dans le mouvement.
Mais en même temps, on se doute bien que, ce n’est pas en agissant ainsi que l’univers s’arrête, que notre univers intérieur s’arrête … que nos atomes vont arrêter de tourner sur eux-mêmes etc. C’est une réflexion et une pratique très intéressante parce que cela débouche sur la notion de méditation, d’ouverture de conscience. Nous faisons l’expérience sur le fait d’accepter de perdre, de manquer, de mourir relativement à une forme de mouvement volontaire. Cela nous met à l’écoute d’un autre type de mouvement, un mouvement qui nous constitue réellement, qui représente notre état d’être mais que l’on a l’habitude complètement de court-circuiter, de mettre de côté pour être dans l’activisme, dans quelque chose qui devient fonctionnel.
Cette notion de concentration peut s’appliquer à notre esprit mais aussi à notre corps. Alors c’est beaucoup plus fort encore, parce que cela peut s’appliquer à tout moment à n’importe quelle forme de dynamique d’action. J’attire perpétuellement votre attention sur ce fait « d’où viennent les mouvements ? ». La peur est le starting-block de l’action. Dans la dynamique d’action, je peux corriger à tout moment des tensions inutiles. C’est quelque chose qui est surajouté et qui vient de mon univers émotionnel: la peur, les frustrations, la colère, la joie… Je peux sans arrêt modifier un petit peu mon mouvement dans l’espace ou mon mouvement intérieur par ces mouvements illusoires.
Quand vous réfléchissez un peu à vos existences, à votre façon d’agir en règle générale, à vos motivations dans la vie, est-ce que cela vous paraît réalisable, applicable ?
Oui bien sûr, il faut être à l’écoute de nos émotions. Être à l’écoute de ses émotions, si on prend cette formule, c’est apprendre à être en relation avec soi, à condition que ce soit une relation amicale.
Devenir ami avec soi-même, au sens le plus noble du terme, pas par intérêt parce que ça m’arrange de… ami parce que je suis dans l’écoute, que je suis capable de comprendre, prendre avec moi ce qui peut des fois me choquer de moi-même, me gêner, me rendre honteux éventuellement, me mettre en colère, me faire peur.
Alors bien sûr, il y un préalable, c’est le principe même de l’ouverture de conscience et ce principe est : je regarde les choses, j’accepte de les voir telles qu’elles apparaissent au lieu de vouloir d’emblée les maquiller, les transformer ou les présenter de telle ou telle façon..J’accepte de les voir avant même de concilier ma relation avec ces choses-là. L’amitié concilie. Si je suis véritablement ami avec quelqu’un, ce n’est pas parce que ce quelqu’un, un beau jour, me dit quelque chose de désagréable, que je vais perdre cette amitié. Peut-être que moi je peux voir ce que j’ai provoqué d’une certaine façon et je peux aussi comprendre que cette personne à ce moment-là ait eu cette réaction pour des tas de raisons. Ce n’est pas cela qui va remettre en question mon amitié.
Tout cela peut se faire si on s’entraîne. Il y a donc cette notion d’entraînement. C’est valable pour tout : si on veut apprendre les langues…le chant, il faut s’entraîner et puis avec cette notion de régularité. Mais cela ne doit pas devenir une obligation ou un besoin (la première des illusions).
Si on prend l’exemple du yoga. Le yoga est un état d’être, ce n’est pas quelque chose à faire. C’est faire en sorte que ton corps ne soit pas un obstacle à être centré, que ton mental puisse s’asseoir… que ta conscience puisse se poser.
En fait le « être à soi », la concentration, c’est accepter de se replacer dans l’expansion universelle, c’est-à-dire le fait de lâcher les tensions, la peur de perdre, la peur de manquer, la peur de mourir…C’est accepter de détendre, de laisser s’exprimer la réalité fondamentale de notre état d’être.
Sans que vous vous en rendiez compte, sans que vous en ayez conscience, en permanence vous avez différents espaces temps dans votre corps, vous avez des zones bien précises de tensions qui se manifestent comme des petits resserrements, des crispations et que ces tensions là, pourraient être détendues.
Donc l’état des lieux de nos espaces émotionnels, ce que j’appelle : faire connaissance, devenir ami avec soi-même, prendre le temps de l’écoute, c’est comprendre comment je suis capable instinctivement, autour de réactions émotionnelles qui sont très en relation avec mon cerveau reptilien, de laisser s’installer, se manifester et durer des tensions que je pourrais très bien apprendre à détendre par, ce que je peux appeler l’ouverture de conscience, le fait d’apporter un rayonnement de lumière, de chaleur et de spiritualité.
Lâcher prise, c’est parvenir à un état de concentration et de détente tel qu’on peut prendre conscience de quelque chose d’intérieur qui continue de vivre immuablement. C’est un mouvement absolument fabuleux mais que l’on cache en permanence sous des oripeaux d’activisme, d’expression, « ça me rassure, voilà je suis dans le feu de l’action ». A suivre …